Démembrement de bien, quels sont les risques ?

Interview d’Antoine Tranchimand dans l’émission Intégrale Placements sur BFM TV le 20 janvier 2014 :

Démembrement de bien, quels sont les risques ?

Retranscription de l’interview :

Cédric pour BFM TV : Au cours de cette chronique sur les donations, la question du démembrement est arrivée sur le devant de la scène. Nous en parlons avec Antoine Tranchimand. Merci de nous avoir rejoints. Vous êtes associé chez K&P finance. Le démembrement, Christian l’a survolé. Nous allons maintenant rentrer dans les détails. Le démembrement désigne la façon de séparer un bien en deux parties, mais pas de façon physique. Sommes-nous d’accord ?

Antoine Tranchimand : Oui, absolument. En droit français, tout bien peut se démembrer. D’un côté, on trouve l’usufruit qui donne le droit de profiter d’un bien, d’en tirer les fruits. Et de l’autre côté, la nue-propriété, qui donne le droit de devenir plein propriétaire à l’extinction de l’usufruit.

Cédric : Le démembrement se décide-t-il à tout moment, selon la volonté du premier propriétaire ?

Antoine Tranchimand : Je vous le confirme. Lorsqu’on est propriétaire d’un bien, on peut décider de le démembrer pour en conserver l’usufruit. Dans un autre cas de figure, un usufruitier et un nu-propriétaire peuvent se mettre d’accord pour acquérir conjointement un bien.

Cédric : Et c’est là que l’investisseur rentre en ligne de compte. Pourquoi les investisseurs sont-ils aujourd’hui tentés de s’intéresser à cette façon de gérer une propriété ?

Antoine Tranchimand : Investir en nue-propriété, c’est acquérir le droit de devenir plus tard propriétaire d’un produit immobilier. L’intérêt de ce type d’investissement est multiple. Tout d’abord, on investit en immobilier sans se préoccuper des problématiques classiques de l’investissement immobilier. C’est-à-dire que la recherche de locataire, la perception des loyers, les loyers impayés, l’entretien du bâtiment sont laissés à la charge de l’usufruitier.

Le deuxième point, c’est qu’investir en nue-propriété implique une revalorisation quasi mécanique de son investissement. Vous comprenez que si la nue-propriété a une valeur, alors qu’elle est grevée d’un usufruit de quinze ans, ou lorsque l’usufruit n’est plus que de dix ans, voire cinq ans, voire s’éteint, la valeur de nue-propriété augmente mécaniquement. Exit tous les aléas liés à l’immobilier d’investissement traditionnel.

Cédric : Il y a des avantages fiscaux dans le cadre des donations. On imagine bien, tant en termes d’IR que d’ISF, sans parler des donations qu’on a déjà évoquées, qu’il y a un intérêt pour l’investisseur sur ces questions de démembrement…

Antoine Tranchimand : Oui. Il y a un avantage fiscal sur l’impôt sur le revenu comme sur l’ISF. En ce qui concerne l’IR, si vous vous endettez pour acheter un bien dont vous n’achetez que la nue-propriété, vous n’allez pas avoir de revenus puisque vous n’avez que la nue-propriété. Et pour autant, vous avez des charges qui sont constituées par des intérêts d’emprunt. Ces intérêts d’emprunt, vous pourrez les passer en charge sur des revenus fonciers que vous auriez par ailleurs, et ainsi abaisser votre niveau d’imposition sur le revenu et votre niveau d’imposition sur les prélèvements sociaux attachés à ces revenus fonciers.

Cédric : D’un certaine manière, c’est un outil pour effacer des revenus fonciers…

Antoine Tranchimand : Tout à fait. Tout ou une partie des revenus fonciers des investisseurs. A contrario, si vous décidez de payer comptant votre investissement, vous allez utiliser de l’argent que vous avez par ailleurs sur un compte-titre ou de l’argent cash, peu importe. Ainsi, vous allez vous appauvrir. Pourquoi ? Car la nue-propriété ne se porte pas à l’actif de l’ISF. Du point de vue de la déclaration de l’ISF, vous vous appauvrissez et vous gagnez la tranche marginale de votre ISF appliquée au montant de votre investissement.

Cédric : Pour celui qui conserve la nue-propriété, il y a donc bien des avantages en termes d’ISF et en termes d’IR. Mais nous n’avons pas encore parlé de celui qui a l’usufruit. Que se passe-t-il pour lui ?

Antoine Tranchimand : Généralement, dans les montages en investissement, l’usufruitier est un bailleur institutionnel à vocation sociale. C’est donc une entreprise, généralement une S.A. d’H.L.M. qui va acheter l’usufruit d’un grand nombre d’appartement pour y faire son métier, c’est-à-dire héberger des personnes sous conditions de ressources et entretenir l’immeuble conformément à des règles qui ont été déterminées.

Cédric : Et si l’usufruitier n’est pas un bailleur social ?

Antoine Tranchimand : Il y a peu de particuliers qui s’intéressent à l’acquisition d’un usufruit car il s’agit d’un produit où ils sont extrêmement taxés.

Cédric : Donc c’est une affaire de propriétaires… Ainsi, même si les investisseurs particuliers peuvent venir investir en nue-propriété, comment s’y prend-on ? Doit-on chercher son usufruitier, seul sur le marché ? Y a-t-il une bourse d’usufruitiers ? Ou ne peut-on passer que par des produits fabriqués par des professionnels ?

Antoine Tranchimand : Je dirais qu’il est préférable de passer par des produits fabriqués par des professionnels… Car ces professionnels vont mettre en relation les besoins d’un usufruitier et la demande des particuliers investisseurs. La bourse de l’usufruit n’existe pas et il faut savoir qu’un bailleur institutionnel n’est jamais intéressé par l’usufruit d’un appartement unique. Il a besoin d’acquérir en bloc des usufruits.

Cédric : Il y a une question qu’un candidat propriétaire qui nous entend pourrait certainement se poser… Dans quel état peut-il retrouver son bien une fois qu’il l’a loué à l’usufruitier pendant un certain nombre d’années ?

Antoine Tranchimand : C’est une question à laquelle, chez K&P Finance, nous répondons régulièrement. Au moment de l’acte notarié, le nouveau propriétaire, le nu-propriétaire ainsi que l’usufruitier signent une convention destinée à régler la répartition des charges entre les deux parties. Dans cette convention de démembrement, se trouve un contrat d’entretien signé par l’usufruitier qui s’engage, pendant la période de démembrement, à entretenir en bon père de famille l’immeuble tant sur les parties privatives que sur les parties communes. Et dans les deux ans précédant l’extinction de l’usufruit, la reprise intégrale de l’appartement – ou des appartements – par le nu-propriétaire, l’usufruitier s’engage à une remise à niveau complète des biens. Ce qui fait que l’investisseur va récupérer un bien en état d’usage qu’il pourra louer, vendre ou occuper selon ses besoins.

Cédric : Au niveau des charges, est-ce la même répartition entre nus-propriétaires et usufruitiers qu’entre locataires et propriétaires classiques ?

Antoine Tranchimand  : Pas vraiment. L’usufruitier se comporte comme un propriétaire, c’est-à-dire qu’il doit assumer l’intégralité des charges de l’immeuble, y compris la taxe foncière. Charge à lui d’aller en rebasculer ou non sur son locataire, ce qu’on appelle couramment les « charges locatives », liées à l’entretien courant de l’immeuble.

Christian Fontaine, rédacteur en chef délégué, Le Revenu : Je vous suis tout à fait. L’achat de la nue-propriété peut s’avérer être un excellent placement, notamment pour les épargnants aisés. Mais vous l’avez dit, l’important est la convention de démembrement qui va préciser qui paye quoi, en matière de travaux, d’entretien, de remise en état du logement au bout d’un certain nombre d’années. Et comme il s’agit, bien sûr, d’un achat, d’un investissement immobilier, le choix de l’emplacement du bien est primordial. Au bout de la période du montage (quinze, dix-sept ou dix-huit ans), vous allez récupérer votre bien. A ce moment-là, il faut qu’il soit bien situé si vous désirez l’occuper vous-même ou le revendre. De plus, il faut que la construction soit de bonne qualité. Il s’agit véritablement d’un type d’investissement un peu particulier : à la fois un investissement immobilier classique, mais avec un montage financier. Il faut à la fois bien regarder les aspects financiers, fiscaux mais aussi les aspects immobiliers.

Cédric : Merci beaucoup Antoine Tranchimand pour K&P Finance pour nous avoir présenté ce démembrement dont on parle ici assez souvent.

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